Je suis l’ombre de moi-même et je cherche ce dont elle est l’ombre.
Aussi longtemps que j’ai été chrétien j’ai pensé que les hommes étaient responsables du mal qu’ils faisaient – je haïssais les tyrans, maudissais les rois et les prêtres. Quand je me suis libéré de l’influence immorale et mensongère, de la philosophie du Christ, ce sont la tyrannie, la royauté, la prêtrise que j’ai haïes – le mal en lui-même ; les rois et les prêtres, j’en ai eu pitié, parce que ce sont des hommes.
EXCOMMUNION : Moi, être, animal, mammifère, tétrapode, primate, placentaire, singe, catarhinien…, homme; âge : dix-huit ans, célibataire (sauf de temps à autre), mégalomane, avec des traces de dipsomanie, dégénéré supérieur, poète, avec des prétentions à l’humour, citoyen du monde, philosophe idéaliste, etc (pour éviter du travail au lecteur).
Je ne me suis jamais perçu autrement que comme une idée de moi-même.
La vie, la vie tout entière, c’est une éternelle rumeur, et la mort, la mort tout entière, son éternel démenti. Espoir, amour, illusion, foi anxieuse dans l’avenir, confiance tremblante dans le présent, tout cela cesse dans son objet et dans soi-même. Passer, c’est se démentir.
J’ai découvert que la lecture est une manière servile de rêver. Si je dois rêver, pourquoi pas mes rêves à moi ?
La science de l’homme est grande; mais son ignorance est sans limites.
Je n’ai jamais eu d’idées sur un sujet quelquonque sans chercher aussitôt à en avoir d’autres.
J’ai toujours trouvé de la beauté à la contradiction, de même que j’ai toujours estimé que le rôle de créateur d’anarchismes était une mission digne d’un intellectuel, car l’intelligence désintègre et l’analyse affaiblit.
Je porte à la vie l’intérêt d’un déchiffreur de charades. Je m’arrête, je déchiffre et je passe.
JE NE SAIS QUI JE SUIS ni quelle âme est la mienne. Quand je parle avec sincérité je ne sais quelle est cette sincérité. Je suis diversement différent d’un moi dont je ne sais s’il existe. J’éprouve des croyances que je n’ai pas.
Je n’ai jamais connu d’ambition qu’une de nos belles journées ou qu’une brise légère n’ait suffi à dissiper en la réduisant à un rêve agréable et fortuit. Je me sens jeune parce que c’est ainsi que j’ai vécu.