Parmi mes plus beaux moments vécus ici, à Imouzer du Kandar,
une bonne partie le furent dans cette arrière cour du bar de Kader,
théâtre lunaire représentant la terrasse d’un impossible palais.
Ainsi, comme en ces jours où monte l’orage de la mémoire,
cette fin d’après-midi incruste les bruits de la rue
qui parlent tout haut, d’une voix solitaire.
Comme la couleur des bougainvilliers qui me cernent
j’imagine la rue qui se plisse de lumière intense et pâle
jusqu’à tenter l’obscurité blafarde dont le tumulte craque d’Est en Ouest.
Froid – tiède – chaud – tout cela à la fois et en une seconde
anéantie par tous ces corps humains – avatars du vieil Adam – qui déferlent de l’autre côté du mur, vers la place centrale,
cailloux lancés dans le silence pour ouvrir une brèche dans la quiétude du crépuscule.
Ce n’est qu’alors que je prends conscience de ne plus entendre l’oiseau chanteur des voisins
et, comme tout se répond,
que je distingue clairement derrière le mur la présence silencieuse d’Halim, le charretier qui rêve, à deux pas.
Alors, sans me questionner sur ce que peut penser Halim en ce moment,
en oubliant le murmure de la fête au loin et de ses odeurs plus proches,
je m’exerce inutilement à baptiser les choses et les événements afin d’éluder l’inexplicable.
Expliquer ! Amusement qui comme toute activité de l’esprit est une tricherie salutaire,
abstraction qui nous dispense de ressentir l’infini et l’horreur,
en construisant une réalité adoucie, confortable et inexacte.
Amoureuse des bougainvilliers, j’aime beaucoup cette photo. Cet homme si zen donne l’envie de quitter nos bouches de métros. Le voilà avec 10 de tension, cela transparait sur ce mur terre de sienne.
Merci Lutin … et je te laisse imaginer la cour de Kader sous les étoiles !
Quant à Halim, c’est effectivement un homme très calme et très raffiné (j’ai des tas d’anecdotes),
j’en veux pour preuve les jantes assorties de sa carriole.
Au fait ! Dans la réalité le mur est rose … c’est pas mal non plus.