Polygone de l’exil

Au col du Portalet, après la frontière,
renait la rivière Gallego qui part indéfiniment vers le Sud
à la découverte de son royaume libre et beau,
dont l’identité et l’évidente fraternité
de tous temps lui étaient promises.

Et cette obsession de la rivière
à creuser et à remplir son territoire,
je la perçois plus comme une détermination
à serrer de près une idée jusqu’à sa conclusion logique.

L’oisiveté me fais poursuivre cette idée le long de la route motivée par le cours d’eau,
fonds turquoises et virages amusés.
Après 120 kms le Gallego passe devant un village éclatant
que l’on regarde à peine tellement il est dominé par d’extravagantes et gigantesques concrétions rouges.

De plus près j’observe des rejets blancs qui sortent des failles des poudingues.
Bien sûr ! Cette rivière est une artiste.
Des vautours fauves habitent les lieux et je devine leurs pensées simples alors qu’ils tournoient au dessus de toute la région.
Ils comparent ce qu’ils voient en bas avec des images qu’ils ont dans le cerveau : « ça se mange ou ça ne se mange pas ».
Ainsi voila la volonté du Gallego,
de l’eau sur la terre sèche et dure, pour le royaume de ceux qui ne possèdent rien et ne servent personne.

Aujourd’hui j’ai l’âme d’une ville orientale,
les animaux sont de foire et les tapis moelleux,
et je prends conscience de ne pas être un sujet
mais un objet de cette histoire.

La réalité me montre la route
qui continue vers le néant,
comme une barque partie à la dérive
reconnaitrai-je mon royaume si je le traversai ?
Tout belvédère pourtant me donnera comme une espérance.

Pourtant il est inutile d’observer une autre rive.
Les eaux coulent, éternelles et silencieuses,
juste un mouvement touché par la grâce.

Et la nostalgie de ce qui est perdu à jamais
fait considérer tous ces territoires étrangers
par les angles du merveilleux et de la découverte,
figure géométrique de la plus grande des possessions.

Mallos de Riglos (Aragon)


Mallos de Riglos (Aragon)

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1 réponse à Polygone de l’exil

  1. Merci pour cette somptueuse photographie sur Los mallos. J’y étais voici une semaine avec bonheur, car c’est là, la terre de mes ancêtres maternels. Une somptueuse lumière accompagnait nos pas de « montagnards », lieu magnifique que j’appelais tout simplement « les portes pourpres de l’ Aragon ».

    Bien à vous.

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